Crédit : FNCAUE

Le “E” de CAUE : une petite lettre pour de grands enjeux

La lettre “E” du sigle CAUE signifie “environnement”. Voilà pourquoi notre engagement en faveur du climat, de la biodiversité… est omniprésent dans nos actions de sensibilisation et de conseil.

Ce mois-ci, nous réagissons à l’actualité et vous proposons de faire le point sur le dérèglement climatique, la neutralité carbone, la Convention Citoyenne pour le Climat, la loi Climat, “l’affaire du siècle”, et aussi la rénovation thermique des bâtiments. Alors oui, forcément… Ce billet prend parti pour notre “E”. Une petite lettre pour de grands enjeux.

 

Le dérèglement climatique et alors ?

  • le climat se dérègle parce que la température moyenne augmente,1
  • la température moyenne augmente à cause des émissions de GES (gaz à effet de serre),
  • les émissions de GES sont dues aux activités humaines.

Augmentation de la désertification, dégradation des sols, flux de gaz à effet de serre, augmentation de la fréquence, de l’intensité et de la durée des événements chauds, des sécheresses mais aussi des précipitations.
Et alors !
Et alors ? Un rapport du GIEC1 nous rappelle que : « Les terres émergées constituent la base principale des moyens de subsistance et du bien-être des êtres humains, incluant l’approvisionnement en nourriture, eau douce et en de multiples autres services écosystémiques, ainsi que la biodiversité. »

Et de poursuivre : « Depuis la période préindustrielle, la température de l’air à la surface des terres émergées a augmenté près de deux fois plus que la température moyenne mondiale. Le changement climatique, y compris l’augmentation de la fréquence et de l’intensité des événements extrêmes, a eu un impact négatif sur la sécurité alimentaire et sur les écosystèmes terrestres et a contribué à la désertification et à la dégradation des terres dans de nombreuses régions. (…) Entre la période 1850-1900 et la période 2006-2015, la température moyenne de l‘air à la surface des terres émergées a augmenté de 1,53 °C, alors que celle à la surface de la planète (terres et océans) s’est élevée de 0,87 °C. »

Et vous ? Vous vivez sur terre ou sur l’océan ? ⇒ Il faut modifier nos activités humaines, et vite !

Neutralité carbone d’ici 2050 ?

La Stratégie Nationale Bas Carbone2 (SNBC) décrit la feuille de route de la France pour conduire la politique d’atténuation du changement climatique. Elle donne des orientations pour mettre en œuvre la transition vers une économie bas-carbone dans tous les secteurs d’activités. Elle définit des objectifs de réduction des émissions de GES à l’échelle de la France à court/moyen terme et a plusieurs ambitions :

  • atteindre la neutralité carbone, c’est-à-dire zéro émissions nettes, à l’horizon 2050,
  • réduire les émissions de gaz à effet de serre de – 40 % en 2030 par rapport à 1990,
  • à court et moyen termes, respecter les budgets carbone adoptés par décret, c’est-à dire des plafonds d’émissions à ne pas dépasser par périodes de cinq ans,
  • et réduire l’empreinte carbone des Français.

Le 2e budget carbone (2019-2023) de la SNBC a été revu à la hausse par le gouvernement français début 2020. L’objectif initial 2019 d’une baisse de -2,3 % est transformé en une baisse de -1,5% dans la révision. Un objectif moins ambitieux donc. En 2019, l’empreinte carbone moyenne d’un Français est de 11,2 tonnes alors qu’elle devrait être de 2 tonnes par an pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris suite à la COP21 en 2015. En février 2021, le président de la république se félicite d’une baisse effective de -1,7 % pour l’année 20193 (année avant la COVID).

Une Convention citoyenne pour le climat : pour quoi faire ?

Prenez 150 personnes, tirées au sort, d’horizons divers, et accompagnez-les pour réfléchir aux enjeux climatiques.

Objectif : « définir les mesures structurantes pour parvenir, dans un esprit de justice sociale, à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990 ».

Qu’à cela ne tienne, 8 mois et une crise sanitaire plus tard, 149 propositions sont livrées au gouvernement !
Ces propositions4, 460 pages dans leur version intégrale, s’organisent autour de 7 grandes thématiques :

  • consommer,
  • se déplacer,
  • se loger,
  • se nourrir,
  • produire et travailler,
  • constitution,
  • et enfin financement.

Dans leur rapport final5, la première chose que souhaitent dire ces 150 citoyens à la société française  : « Ce que nous avons vécu est une véritable prise de conscience de l’urgence climatique : la Terre peut vivre sans nous, mais nous ne pouvons pas vivre sans elle. À titre d’exemple, les températures caniculaires supérieures à 50°C à l’ombre, qui vont devenir plus fréquentes, seront mortelles dans certaines régions du monde où l’air saturé en humidité interdit toute évaporation de la sueur. Ouvrons donc les yeux et bougeons-nous ! »

Avec ou sans filtre ?

Le site de la Convention Citoyenne pour le Climat précise :  « Le Président de la République s’est engagé à ce que ces propositions législatives et réglementaires, celles issues de la Convention Citoyenne pour le Climat, soient soumises “sans filtre6 ” soit à référendum, soit au vote du parlement, soit à application réglementaire directe. »

Sur un site dédié, vous pouvez suivre les 149 mesures proposées par les 150 citoyens, et voir dans le détail celles qui sont – dans le projet de loi climat – appliquées, partiellement appliquées, débattues, en danger, rejetées, ou simplement non traitées.

Et le projet de loi Climat dans tout cela?

En janvier 2021, le gouvernement reconnaît que le projet de loi pour lutter contre le dérèglement climatique et renforcer la résilience face à ses effets, plus succinctement appelé « loi Climat », ne permettra pas d’atteindre les objectifs climatiques de la France d’ici à 2030. Il est pourtant issu du travail mené par la Convention Citoyenne pour le Climat et de leur 149 propositions, s’attaquant à tous les sujets de la vie quotidienne.

Le 10 février 2021, le projet de « loi Climat » est présenté en Conseil des ministres. Il ambitionne d’inscrire dans la loi 46 propositions de la Convention Citoyenne (soit 30 %). Le député Matthieu ORPHELIN et son équipe évaluent la baisse de GES liée au projet de loi climat à 13 millions de tonnes en équivalent CO2 par an en 2030. Chiffre à mettre en regard des 112 millions de tonnes correspondant à 40 % de baisse entre 1990 et 2030. Matthieu ORPHELIN rappelle également que le nouvel objectif fixé par la Commission européenne est une baisse de 55 %.

Le 28 février, les 150 de la Convention Citoyenne se rassemblent pour une dernière session. Appelés à évaluer si les décisions du gouvernement sont à la hauteur des enjeux, ils attribuent une note moyenne de 2,5/10

(vous pouvez aussi lire les analyses de “banque des territoires” sur le projet de loi climat)

Tous les signaux ne sont-il pas au rouge ?

Nombres d’acteurs s’accordent à dire que ce projet de loi n’est pas assez ambitieux et que les propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat ont été détricotées. D’aucuns diront qu’il s’agit là de mouvements associatifs, d’opposants politiques. Mais le CESE (Conseil économique social et environnemental) et le Conseil d’État, ou encore le CNTE (Conseil national de la transition écologique) sont tout aussi mitigés pour ne pas dire déçus et inquiets par le projet de loi Climat. Leurs avis officiels7 sont là pour en témoigner. Le projet de loi Climat sera examiné à l’Assemblée fin mars 2021.

L’affaire du siècle enfonce le clou

Source : laffairedusiecle.net
Le 3 février 2021, le tribunal administratif de Paris rend son jugement et marque un tournant décisif dans la lutte contre la crise climatique. La justice vient de reconnaître que l’inaction climatique de l’État est illégale, que c’est une faute, qui engage sa responsabilité. Que l’inaction de l’État contribue à l’aggravation des changements climatiques. Le tribunal a estimé que le non-respect par l’État de ses engagements de réduction d’émissions de GES cause un “préjudice écologique”, c’est-à-dire des dommages graves à l’environnement.

Les mesures que le Tribunal pourra à l’avenir obliger l’État à prendre sont des mesures que l’État aurait dû mettre en place pour respecter les objectifs qu’il s’est lui-même fixés, c’est-à-dire des mesures prévues, votées par les parlementaires en toute souveraineté, mais qui n’ont pas été appliquées. Une étude du cabinet indépendant Carbone 4 publiée en septembre 2019, estimait que les actions individuelles ne représenteraient au maximum, que 25 % des efforts nécessaires pour se maintenir dans la trajectoire assignée par l’accord de Paris. Les 75 % restants sont en partie dans les mains de l’État, qui, s’il se décidait à adopter une politique responsable, pourrait infléchir la courbe.

Rappelons aussi que si des mesures fortes ont un coût, on entend beaucoup plus rarement parler du coût de l’inaction. Une étude menée par des chercheurs britanniques estime que l’inaction climatique coûtera entre 10 000 et 50 000 milliards de dollars au cours des 200 prochaines années ! Soit entre 40 et 210 milliards d’euros par an.

L’exemple de la rénovation thermique des bâtiments

Le 10 février 2021, la mission d’information parlementaire sur la rénovation thermique des bâtiments, présente son rapport8. Sans même lire l’intégralité des 177 pages, le titre de la première partie annonce la couleur… «  La rénovation thermique des bâtiments : des objectifs ambitieux encore loin d’être atteints ».

L’intitulé de la deuxième partie n’est guerre plus engageant : « Les freins persistants au déploiement d’une politique ambitieuse de rénovation ».

Enfin, Vincent DESCŒUR, président de la mission, déplore : « Il y a une inadéquation entre des objectifs très ambitieux et les moyens mis en œuvre pour les atteindre ».

Selon la feuille de route nationale, l’ambition est d’assurer 370 000 rénovations globales d’ici à 2022, puis 700 000 par an à partir de 2030. En septembre 2020, Philippe ALLUIN, ingénieur-architecte, partageait déjà son analyse dans une tribune publiée dans le journal le Monde9 : « Somme toute, on passe de 2,8 milliards d’euros par an en 2019 à 1 milliard d’euros par an en 2021. Avec le plan dit « de relance », les aides à la rénovation énergétique des logements auront donc été divisées par trois… »

Dans une tribune10 publiée le 22 juillet 2019, trois spécialistes de collapsologie écrivent : « Il faut trancher dans le vif. Soit laisser filer la croissance et nos standards de vie en risquant l’emballement des problèmes, soit tenir compte des conclusions du récent rapport du Haut Conseil pour le climat, qui indiquent que seules des politiques de ruptures – économiques, techniques, sociales, culturelles, et donc politiques – peuvent nous conduire sur la trajectoire d’émissions de GES compatibles avec les COP successives. »

Dans la rénovation thermique des bâtiments, comme plus largement dans nos déplacements, notre alimentation, notre vie quotidienne, nos modes de consommation, la situation requiert une approche globale, systémique. Utilisée depuis de nombreuses années, reprise et appliquée dans les 149 propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat, l’expression « changement de paradigme » n’a jamais pris autant d’importance qu’aujourd’hui. Car oui, la situation exige certes une représentation du monde, une manière de voir les choses différentes, mais surtout d’agir vite et avec ambition.

Et le CAUE dans tout ça?

Fort d’une expérience de plus de 40 ans dans de nombreuses thématiques impactant le confort, la santé, et l’environnement au sens large, le CAUE est présent à vos côtés pour vous apporter conseils et accompagnements, gratuitement :

Contactez-nous !

En outre, les CAUE avec leur Fédération Nationale ont lancé le 29 septembre 2020 le cycle E : un cycle de travail et d’échanges sur l’environnement en valorisant leurs actions de terrain. Une galerie vidéo et un premier webinaire « Le nouveau défi : habiter le vivant » sont en ligne [ PLUS D’INFOS ]


1 – GIEC, 2019 : Résumé à l’intention des décideurs (PDF – 749Ko)
2 – Stratégie Nationale Bas-Carbone révisée complète (PDF – 3.67 Mo)
3 – Tweet d’Emmanuel Macron
4 – Voir aussi le site de la Convention Citoyenne pour le Climat
5 – Rapport final de la Convention Citoyenne (PDF – 3,8Mo)
6 – Vidéo sur l’évolution du “sans filtre” d’Emmanuel Macron (4’40)
7.1 – Lien direct : Rapport du CESE (PDF – 5,8Mo)
7.2 – Lien direct : Rapport du Conseil d’État (PDF – 464Ko)
7.3 – Lien direct : avis 2021 du CNTE (PDF – 464Ko)
8 – Rapport de l’assemblée nationale sur la rénovation thermique des bâtiments (PDF – 2,7Mo)
9 – Plan de relance : « Les aides à la rénovation énergétique des logements vont être de fait divisées par trois » Publié le 27 septembre 2020 ; article du Monde réservé aux abonnés
10 – Climat : « La collapsologie fait débat c’est une bonne nouvelle » Publié le 22 juillet 2019 ; article du Monde réservé aux abonnés

2 commentaires sur “Le “E” de CAUE : une petite lettre pour de grands enjeux

  1. Luc Nèples dit :

    En complément, j’ai trouvé un témoignage sur le 1er “Ty village” de France, implanté dans la commune de St Brieuc > https://www.podcastics.com/podcast/episode/aur%C3%A9lie-un-ty-village-de-tiny-houses-%C3%A0-saint-brieuc-62486/

    et on peut télécharger le dossier présenté au CAUE et à la commune avec ce lien : https://drive.google.com/file/d/1JDhC9CWaxXv21aRBqgB824epC848CQOp/view?usp=sharing

  2. Luc Nèples dit :

    Merci pour ce résumé qui va aider ceux qui se questionnent à mesurer les enjeux.
    Ensuite on se demande ce qu’on peut faire. Les conférences de Jean-Marc Jancovici apportent des données chiffrées précises sur l’état des lieux et suggèrent des actions efficaces. A notre niveau on peut réduire son impact environnemental, choisir la décroissance, renoncer aux comportements énergivores. En France les terres sont cultivées à 80% pour nourrir les animaux etc. Les urgences sont multiples. On pourrait commencer par rémunérer correctement les agriculteurs (2 suicides par jour) puis structurer les ressources alimentaires au plus proches des villes, si peu résiliantes. Réindustrialiser pour acheter de moins en moins Chinois. Eduquer à la permaculture, développer la création de zones “pastilles” pour l’implantation de groupements de tiny house associées à des jardins partagés. Les projets enthousiasmants ne manquent pas mais les règles administratives doivent évoluer vite pour les laisser éclore. Le CAUE peut aider les communes à s’ouvrir à ces alternatives d’habitat minimaliste et coopératif.

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